Emmanuel Macron a récemment mis sur la table une proposition qui ne manque pas de susciter des débats : utiliser l’épargne des Français pour financer les dépenses militaires.
Dans un contexte géopolitique de plus en plus tendu, cette proposition a suscité de vives discussions, tant au sein de la classe politique que dans l’opinion publique.
Mais en quoi consiste réellement cette proposition et quels impacts pourrait-elle avoir sur l’épargne des Français ? On fait le point.
Un contexte géopolitique favorisant les besoins en matière de défense
Les tensions géopolitiques, exacerbées par la guerre en Ukraine, placent la France et l’Europe dans une position de plus en plus vulnérable.
Alors que les États-Unis ont annoncé réduire leur présence militaire en Europe, l’Union européenne se voit contrainte de prendre des mesures pour renforcer sa souveraineté en matière de défense.
La présidente de la Commission Européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé récemment un plan d’armement européen, nommé « Rearm Europe », d’un montant de 800 milliards d’euros pour financer la défense européenne et sécuriser le continent face à des menaces de plus en plus pressantes.
Dans ce contexte, la France doit elle aussi faire face à un besoin urgent d’augmenter ses dépenses militaires. Le budget de la Défense, actuellement fixé à environ 2,1 % du PIB, pourrait être porté à 5 % d’ici 2025, soit un montant total de 50 milliards d’euros, contre 47 milliards d’euros en 2024.
Cette augmentation significative est nécessaire pour moderniser les équipements militaires, renforcer les capacités technologiques de l’armée française et répondre aux nouvelles exigences géopolitiques.
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Une nouvelle forme d’épargne pour soutenir l’industrie de défense
C’est dans ce contexte que le président Emmanuel Macron a proposé une solution originale pour financer cette hausse des dépenses : utiliser l’épargne des Français à travers un nouveau produit d’épargne dédié, sur le modèle du Livret A ou du Livret LDDS.
L’idée serait de permettre aux Français d’investir directement dans la défense nationale, en particulier dans les petites et moyennes entreprises du secteur de la défense, souvent confrontées à un manque de financement de la part des institutions bancaires classiques.
Ce projet est motivé par un constat simple : en France, l’épargne des ménages est l’une des plus élevées d’Europe, atteignant environ 18 % du revenu disponible, ce qui représente une somme conséquente pour financer des projets d’envergure nationale.
En 2024, les livrets A et LDDS détenaient près de 570 milliards d’euros, dont une part importante pourrait être réorientée vers des projets liés à la défense et à l’armement.
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Un rendement attractif pour convaincre les épargnants
Cependant, pour que ce projet ait une chance de succès, il devra proposer un rendement attractif pour les épargnants.
L’économiste Philippe Crevel souligne que pour inciter les Français à investir leur argent dans ce type de produit, celui-ci devra offrir un rendement supérieur à l’inflation, voire au Livret A, actuellement à 2,4 % de taux d’intérêt.
Un tel rendement serait essentiel pour que les citoyens aient l’assurance que leur argent ne perdra pas de sa valeur, tout en contribuant à l’effort de défense national.
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Une alternative : réorienter les fonds du livret A vers la défense
En parallèle, une autre piste envisagée par le gouvernement serait de réorienter une partie des fonds actuels du Livret A et du LDDS vers le financement des PME de la défense. Cette réorientation permettrait de mobiliser des ressources déjà existantes pour soutenir le secteur militaire sans nécessiter la création d’un produit totalement nouveau.
Le député Christophe Plassard a d’ailleurs suggéré cette option dans un rapport parlementaire, estimant que l’utilisation des fonds du Livret A pour financer la défense pourrait être une solution rapide et efficace, vu la disponibilité immédiate des fonds.
Un sénateur Pascal Allizard (LR) a également soumis la même proposition. Cette proposition, soutenue à plusieurs reprises par le Sénat, préconise d’utiliser environ 40 % des fonds des livrets A et LDDS vers les entreprises de défense, en ciblant particulièrement les PME du secteur.
Le gouvernement, quant à lui, semble plus favorable à la création d’un produit d’épargne distinct, intitulé « livret de défense souveraineté« , comme l’avait suggéré Rachid Temal, ancien sénateur socialiste.
Cette approche permettrait de créer un produit spécifique pour la défense, sans perturber le financement du logement social, tout en permettant aux Français de participer à l’effort militaire.
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les obstacles juridiques à la mobilisation de l’épargne
Si l’idée de mobiliser l’épargne des Français pour financer la défense séduit certains membres du gouvernement et des députés, elle rencontre cependant plusieurs obstacles, notamment sur le plan juridique.
En effet, en 2023, le Conseil constitutionnel a invalidé deux tentatives de réorienter l’épargne réglementée vers l’industrie de défense, jugeant que cela contrevenait aux objectifs sociaux de ces livrets.
Traditionnellement, le Livret A et le LDDS financent le logement social et les infrastructures publiques, comme les hôpitaux et les universités, et il serait difficile de modifier cette affectation sans remettre en cause leur rôle initial.
Un financement controversé : les Français seront-ils prêts à investir ?
Si certains voient dans cette initiative un moyen de renforcer la souveraineté nationale sans accroître la dette publique, d’autres y voient une intrusion dans leur épargne, qui pourrait être mieux utilisée pour d’autres priorités, comme la transition énergétique ou les besoins sociaux.
Le général Christophe Gomart, député européen (LR), a suggéré que cette participation pourrait être volontaire, afin que chacun puisse choisir de contribuer à cet effort. L’idée serait de laisser aux Français la possibilité d’investir, tout en leur garantissant que les fonds seraient utilisés de manière transparente et qu’ils pourraient récupérer leur argent en cas de besoin.
En fin de compte, la décision de mobiliser l’épargne des Français pour financer la défense dépendra en grande partie des choix politiques à venir. Le gouvernement devra trouver un équilibre entre les impératifs de sécurité nationale et les attentes des citoyens.
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Conclusion : un choix stratégique pour l’avenir de la France
Le projet d’utiliser l’épargne des Français pour financer la défense soulève des enjeux de taille. Dans un monde de plus en plus incertain, la France doit être prête à relever les défis de sécurité qui se profilent à l’horizon.
Pour cela, l’implication des citoyens à travers l’épargne pourrait devenir un levier stratégique essentiel. Mais pour que ce plan soit couronné de succès, il devra répondre à des critères économiques, juridiques et sociaux stricts, et convaincre les Français de l’importance de cette initiative pour garantir leur sécurité et leur avenir.
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